Cette question était au centre des Journées de l’Économie tenues les 4 et 5 février 2014 à la Chambre de Commerce du Grand-Duché de Luxembourg. L’évènement a réuni près de 500 personnes venues écouter et échanger avec les acteurs politiques, entrepreneurs et économistes présents. La première demi-journée, axée sur la politique économique, a permis aux intervenants de s’exprimer sur la situation du pays et d’analyser les mesures et réformes annoncées par le nouveau gouvernement. Lors de la seconde demi-journée, le débat s’est focalisé sur les opportunités de développement que représente l’export et sur la nécessité de fédérer acteurs publics et privés pour promouvoir le Luxembourg.
Entre rigueur budgétaire et relance de la compétitivité
Pour lancer les débats, Didier Mouget, Managing Partner, PwC Luxembourg, a dressé le tableau du pays en s’appuyant sur les principaux indicateurs économiques. « Après six années de crise, la croissance est de retour, avec 1,3% de croissance estimée en 2014 et 1,6% en 2015″. La dette publique, attendue à 28,7% en 2015, reste très en deçà de la moyenne européenne. La tendance est cependant à la hausse depuis plusieurs années. « Il est essentiel que l’on maintienne la stabilité financière pour garder notre triple A. Les mesures du gouvernement vont dans ce sens ».
Alors que le pays va devoir affronter un « choc budgétaire » causé par la perte des recettes de la TVA sur le commerce en ligne prévue à partir de 2015 et la lutte contre les déficits pour revenir à l’équilibre, Etienne Schneider, Vice-Premier Ministre et Ministre de l’Économie, a exposé sa feuille de route. Pour contrecarrer l’impact de la rigueur budgétaire et améliorer la compétitivité du pays, le gouvernement de coalition a élaboré une stratégie globale de réformes. L’objectif est de « faire plus avec moins de moyens ». Le Vice-Premier Ministre a annoncé plusieurs mesures phares dont la loi TGV de simplification administrative, la mise en place d’un grand ministère de l’économie qui « intègre les PME du commerce, de l’artisanat et du tourisme », et un plan d’action PME qui servira de cadre à une politique des classes moyennes plus dynamique adaptée aux besoins des PME, avec notamment « la mise en œuvre d’un nouveau plan sectoriel des zones d’activités économiques afin d’augmenter les capacités d’infrastructures nécessaires qui répondent à la demande actuelle ».
Ces mesures seront-elles suffisantes ?
Les acteurs du monde économique estiment que les annonces du gouvernement vont dans le bon sens, mais ils attendent maintenant leur mise en place. Robert Dennewald, Président de la Fedil souligne ainsi que « le coût salarial unitaire a augmenté de 20% au Luxembourg quand il n’a augmenté que de 10% en Allemagne. Le coût de l’énergie, quatre fois moins élevé aux Etats-Unis, et le coût des terrains pénalisent les entreprises industrielles luxembourgeoises ». Une attention particulière a été portée au thème de l’éducation et de la formation. L’ensemble des intervenants s’est entendu sur le nécessaire rapprochement entre formation et entreprises pour valoriser l’image de l’entreprise et développer un esprit d’entreprenariat.
La présentation de Jean-Marc Fournier, économiste à l’OCDE, a permis d’avoir un regard extérieur sur les atouts de l’économie luxembourgeoise, mais aussi ses pistes de progression. « Le pays est dans une position assez confortable avec le PIB par habitant le plus élevé de tous les pays membres de l’OCDE. Les finances publiques du Luxembourg sont plus solides. Le Luxembourg a toutes les marges de manœuvre pour faire des réformes et être mieux armé pour affronter les défis qui l’attendent ».
L’OCDE pointe aussi du doigt la nécessité d’améliorer le suivi des chômeurs et de revoir les aides pour qu’elles soient plus incitatives au retour à l’emploi. Concernant les finances publiques et la baisse attendue des recettes, l’organisme recommande de poursuivre la réforme des pensions qui, à long terme, devra tenir compte des travailleurs frontaliers aujourd’hui en majorité actifs. Le secteur financier, quant à lui, représente aujourd’hui un tiers du PIB. Avec l’échange automatique d’informations, le STATEC estime qu’il pourrait se contracter de 5%. L’OCDE recommande dès lors une plus grande diversification sectorielle, notamment vers l’économie de la connaissance.
Les échanges commerciaux : la force du Luxembourg
Une plus grande diversification sectorielle, mais aussi géographique, est nécessaire : les échanges commerciaux sont d’une importance capitale pour le Luxembourg pour continuer son développement et pérenniser sa croissance. C’est, notamment, grâce à cette économie ouverte que le pays a pu enregistrer des taux de croissance positifs et faire face à la crise de 2008. Comme l’indique Carlo Thelen, Directeur général de la Chambre de Commerce du Grand-Duché de Luxembourg : « Les échanges de biens et de services avec l’étranger stimulent les performances économiques du pays. Si le marché européen constitue encore la majorité des exportations des entreprises luxembourgeoises, il est nécessaire de diversifier nos débouchés. Les pays émergents, tels que les BRIC ou les CIVETS, représentent des perspectives de développement économique importantes ». Et Luc Henzig, associé chez PwC Luxembourg d’ajouter : « Pour se développer, une entreprise luxembourgeoise doit exporter. Le seul marché domestique ne suffit pas et l’exportation a l’avantage de stimuler l’innovation car l’entreprise, face à une plus grande concurrence, doit adapter ses produits et services à de nouveaux marchés ».
Construire ensemble le « nation branding » du Luxembourg
Faire savoir le savoir-faire luxembourgeois et promouvoir la diversité du pays sur la scène internationale, tels sont les nouveaux enjeux du Grand-Duché. Venue présenter l’exemple de la Suède en matière de « nation branding », Annika Rembe, Directrice générale de la Swedish Institute, explique : « Différentes entités, publiques et privées, chacune spécialisée dans son domaine (tourisme, industrie, diplomatie, recherche…) œuvraient à la promotion de la Suède. Nous avons décidé de créer un organisme chargé de fédérer ces entités pour travailler ensemble sur une approche unique de nation branding ». Elle poursuit : « Le but est avant tout de faire valoir la réputation d’un pays et cela passe par son identité, son image et sa communication. Il s’agit de comprendre comment le pays est perçu et comment influencer cette perception dans le sens souhaité ».
Se pose ainsi la question des messages que le Luxembourg souhaite véhiculer à l’étranger et qui doit s’en charger. « Le nation branding est l’affaire de tous », a indiqué Tania Berchem, coordinateur général pour la promotion de l’image de marque au Ministère des Affaires étrangères et européennes. « Le gouvernement est là pour fixer un cadre mais le secteur privé et les partenaires sociaux sont tout autant concernés. L’approche est clairement participative. C’est ensemble que nous construirons la stratégie de marque du Luxembourg ». Les avantages sont légion : créer des relations de confiance avec les autres pays, exporter les produits luxembourgeois, attirer des investisseurs, des talents et des touristes.