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Les leçons des entreprises qui se réinventent

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La crise économique ne cesse de faire des dégâts. Pourtant, des entreprises se distinguent par d’excellentes performances. Elles fondent leur stratégie sur des règles précises, dont une ambition affirmée plutôt qu’un repli sur soi et la réduction obsessionnelle des coûts.


« Nos entreprises traversent une crise profonde, dure: la tendance peut être de sombrer dans le fatalisme, pointait Pierre-Alain De Smedt, président de la FEB en ouverture du Forum 2013 de la fédération patronale sur le thème ‘Reinvent Your Business’. Mais le pessimisme ne mène nulle part. Nous nous situons à un moment charnière. Attendre que la stabilité et la sécurité reviennent n’est pas une option: une des rares certitudes, c’est au contraire que le modèle ‘business as usual’ n’a plus lieu d’être. Les entreprises qui veulent prospérer demain doivent donc mettre les mains dans le cambouis aujourd’hui. Il existe des opportunités à saisir pour qui sait les voir. »
Le défi consiste à déterminer quelles sont les clés du succès dans notre monde en évolution rapide. C’est pourquoi la FEB a demandé à Deloitte d’analyser les facteurs et stratégies qui expliquent le succès d’entreprises identifiées comme « super-performantes ». L’étude a porté sur quelque 5.000 entreprises sur la période 2003-2011 pour révéler la formule gagnante leur ayant permis de surpasser systématiquement les entreprises dans leur marché. « Ce n’est pas la performance absolue, mais bien la performance relative qui fait l’objet de notre attention, souligne Rik Vanpeteghem, patron de Deloitte en Belgique. Une entreprise très performante se définit comme une entreprise figurant, pour au moins 50% de la période, parmi les 30% des sociétés les plus performantes de son secteur et ce, en termes tant de croissance de son chiffre d’affaires que de rentabilité nette des moyens engagés (ROA). »

Trois recettes

L’analyse établit que 204 entreprises répondent à ces critères stricts, soit 4% de l’échantillon étudié. « Il semble y avoir principalement deux voies pour devenir une entreprise dite ‘super-performante’, observe Jean-Michel Mollo (en photo), Strategy Leader chez Deloitte. Parmi ces quelque 200 entreprises qui sont devenues ‘Super Achievers’ sur la période 2003-2011, 46% ont fait le choix stratégique d’asseoir leur rentabilité avant de réaliser des taux de croissance supérieurs à la moyenne. Environ 36% sont passées directement du statut de ‘Safety Player’ – croissance et rentabilité limitée – à celui de ‘Super Achiever’ en augmentant simultanément leur chiffre d’affaires et leur ROA. Bien qu’il n’existe aucune règle universelle en la matière, la deuxième stratégie est manifestement plus rapide et plus attractive sur le plan financier. »
Diriger une entreprise, c’est réaliser sans cesse des arbitrages difficiles dans des conditions toujours incertaines et souvent changeantes, appuie-t-il. Mais les sociétés super-performantes abordent généralement ces arbitrages en gardant consciemment ou inconsciemment à l’esprit trois règles simples:

1. Accroître la valeur plutôt que réduire les prix

S’il est possible de concilier meilleur prix et qualité supérieure, c’est assez rare dans la réalité: l’entreprise doit presque toujours opérer un choix. « Et, malgré les nombreux exemples de sociétés qui ont très bien réussi en appliquant une politique de bas prix, qu’il s’agisse de compagnies aériennes ‘low cost’ ou de ‘hard-discounters’, ces entreprises, en apparence prospères, sont rarement celles qui parviennent à maintenir des niveaux de performance élevés sur le long terme, relèvent les auteurs. Une différenciation fondée sur des facteurs non liés au prix se révèle systématiquement être la condition sine qua non d’une rentabilité élevée à long terme. Dans la plupart des cas, les clients sont prêts à payer un prix élevé pour une valeur supérieure: fiabilité, convivialité, durabilité, etc. »

2. Accroître les revenus plutôt que réduire les coûts

Près de deux tiers des entreprises interrogées dans le cadre de l’étude sont d’accord pour dire que les stratégies visant un accroissement des revenus sont plus susceptibles de garantir le succès à long terme que les stratégies consistant à réduire les coûts. Bien entendu, se montrer attentif à l’efficacité opérationnelle et éliminer les activités dépourvues de valeur ajouter sont essentiels, mais l’on est probablement arrivé aux limites de ce raisonnement dans le contexte de la crise actuelle… Autrement dit: pour augmenter les revenus, il faut oser investir.

« Pour les leaders d’entreprises super-performantes, le priorité n’est pas l’élaboration d’un business plan au sens traditionnel. »

Le secteur des services RH est parlant à ce niveau: d’après l’étude, les quatre sociétés ‘Super Achievers’ de l’échantillon ont connu, en moyenne, une croissance du chiffre d’affaires de 20,1% sur la période 2003-2011 et un ROA moyen de 27,7%. Les 49 ‘Safety Players’ sont à, respectivement, 6,8% et 2,2%. Les auteurs relèvent que les ‘Super Achievers’ ont vu leurs coûts augmenter presque aussi rapidement que l’inflation, autour de 19,5%. En revanche, les coûts des ‘Safety Players’ s’établissaient à un niveau nettement inférieur, de l’ordre de 10,5%. « Les premiers semblent avoir accepté d’engager des coûts accrus nécessaires pour offrir une valeur supérieure, ce qui a finalement conduit à une rentabilité plus importante, alors que les seconds ont adopté des stratégies d’optimisation des coûts qui n’ont pas permis de générer une performance financière supérieure. »

3. Expérimenter de nouvelles idées plutôt qu’élaborer des business plans détaillés

Les entreprises semblent attendre une reprise plus marquée et une diminution de l’incertitude pour lancer de vastes programmes d’investissements. Or, la stratégie gagnante consiste peut-être à penser grand, mais à commencer petit, à s’adapter rapidement et à agir intelligemment. « Pour les leaders d’entreprises super-performantes, le priorité n’est pas l’élaboration d’un business plan au sens traditionnel, conclut Jean-Michel Mollo. Ils lancent continuellement de nouvelles initiatives stratégiques et créent un portefeuille de croissance et d’avantages pouvant être développés rapidement et abandonnés tout aussi vite. Ce qui exige de la flexibilité, mais également l’acceptation de l’échec car celui-ci permet d’apprendre. »


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